Un cauchemar terrifiant (texte)


Un petit texte pour travailler les émotions


Il fait sombre. La nuit a transformé la corolle des arbres en une masse indistincte et mouvante. Les feuilles bruissent, répondant aux murmures du vent.  Tout près, une branche craque.

Tapie derrière les troncs serrés, l’ombre est là, prête à fondre sur lui. Il court, court, longtemps, et finit par s’arrêter, hors d’haleine. Penché en avant, mains sur les cuisses, il reprend son souffle. Silencieuse, la forme noire rampe au sol. Il ne la voit pas.

Il relève la tête au moment où l’ombre touche ses pieds. Le contact est froid. Pas douloureux, juste glacé. La terreur monte en lui. Il hurle.  François se réveille, en sueur. Levant la tête, il distingue dans la pénombre, au bout d’une dizaine de secondes, la forme rassurante de l’armoire et de la commode. À sa droite, les chiffres fluorescents du radio-réveil indiquent 2:28.

François pousse un long soupir. Ce n’est pas la première fois qu’il fait ce cauchemar. Mal à l’aise, il ferme les yeux et attend le retour du sommeil. Il avance d’un pas tranquille sur une jolie route, avec de gros pavés arrondis et luisants.

Un flou. L’univers se gomme, puis se redessine.  Maintenant, il se trouve au milieu d’une minuscule clairière, éclairée par la lueur blafarde d’une lune rousse. Tout autour, une haie de troncs serrés l’isole du reste du monde. Inquiet, il observe les environs.
Un sentiment d’urgence le pousse à marcher pour se mettre à l’abri… Il s’arrête, hésite.   De quel côté aller ? Il se décide soudain, s’élance au milieu des ronces. Les épines lui lacèrent les jambes.  Soudain, une vibration sourde retentit derrière lui.  Il se retourne, écarquille les yeux. La forme noire glisse sur le sol, recouvrant l’empreinte de ses pas. Il se met à courir. Les buissons le freinent, s’accrochent à lui. Il se débat, mais n’avance pas. Un cri d’horreur s’étrangle dans sa gorge : l’ombre noire englue ses pieds, escalade ses jambes.  Prisonnier du monstre vorace, il agite les bras et cherche désespérément à s’enfuir.
C’est son propre hurlement qui le réveille.
François ouvre les yeux, encore possédé par la scène de son cauchemar. Haletant, il continue de se débattre dans l’obscurité. Ses doigts agrippent le drap.  L’ombre gluante ne veut pas lâcher ses jambes.  Luttant contre le rêve, François tend le bras, tâtonne, sent l’interrupteur sous ses doigts. La lumière jaillit. La forêt sinistre fait aussitôt place aux fleurs roses du papier peint. Chaque objet se retrouve, par le miracle de l’électricité, à sa place habituelle. Encore tremblant, un peu hébété, François tente de se rassurer. Mais les images le hantent encore…
Pour se changer les idées, il attrape le livre posé au pied de la lampe de chevet. Il ôte le marque-page et commence à déchiffrer les lignes serrées du texte. À présent, il redoute de s’endormir. Il décide de lire jusqu’aux tréfonds de la nuit, jusqu’aux premières lueurs de l’aube.

D’après L’Ombre, Sylvie Miller, Utopiae 2003,  L’Atalante, 2003


  1. Repérer, au fil du texte, toutes les émotions que ressent François. Quel est l’impact physique de ces émotions ? Quelle influence ont-elles sur son comportement ?
  2. Trouver d’autres exemples de situations où les émotions ont un impact physique et influencent le comportement.

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