Découverte / vieux manuel


Je suis toujours surprise de voir à quel point le choix des textes a changé depuis les années 40-50!  C’est incroyable ce recul quand on y pense.

J’ai déniché ce petit manuel de français (1960) dans une vente débarras.

Un petit bijou de manuel!

Sérieusement, je me demande toujours pourquoi nos chers pédagogues ont délaissé tous ces textes magnifiques et inspirants?  Pourquoi ne pas avoir conservé cette belle idée d’inspirer à travers le travail scolaire?

C’est devenu tellement banal d’être «instruit» de nos jours qu’on dirait que le désir d’apprendre, de s’instruire, d’être inspiré, de se surpasser, l’amour et le respect du travail bien fait,…  plus rien ne semble attirer l’attention.

Tous ces mots couchés sur papier par des auteurs inspirés peuvent servir à inspirer nos jeunes!

Voici un texte proposé dès les premières pages :

Lettre d’un père à sa fille.

Turin (Italie), le 3 juin 1797.

J’ai été très content, ma bonne petite Adèle, de l’extrait du journal le Rédacteur, que tu m’as envoyé.  Il est très bien choisi, et contient des vérités intéressantes. Quand on cite les journaux, il faut citer le jour et l’an, et même le numéro, si l’on peut, pour le retrouver à volonté; par exemple : Rédacteur du samedi 27 mai 1797, no 185.  Quand il s’agit de livres, on cite le tome, le chapitre, et quelquefois la page.  Voilà, mon enfant, une petite leçon que je te donne en passant ; car, en te louant sur ce que tu fais de bien, je tâche toujours de te conduire à faire encore mieux, rien ne me faisant plus de plaisir que d’avoir de nouvelles raisons de t’aimer.

J’ai été aussi très content du verbe chérir que tu m’as envoyé.  Je veux te donner un petit échantillon de conjugaison, mais je m’en tiendrai à l’indicatif, c’est bien assez pour une fois.

Je te chéris, ma chère Adèle, tu me chéris aussi, et maman te chérit ; nous vous chérissons également, Adolphe et toi, parce que vous êtes tous les deux nos enfants, et que vous nous chérissez aussi également l’un et l’autre ; mais c’est précisément parce que vos parents vous chérissent tant, qu’il faut tâcher de le mériter tous les jours davantage.  Je te chérissais mon enfant, lorsque tu ne me chérissais point encore ; et ta mère te chérissait peut-être encore plus, parce que tu lui as coûté davantage.  Nous vous chérissions tous les deux lorsque vous ne chérissiez encore que le lait de votre nourrice, et que ceux qui vous chérissaient n’avaient point encore le plaisir du retour.  Si je t’ai chérie depuis le berceau, et si tu m’as chéri depuis que tu as pu dire : Mon papa m’a toujours chérie, si nous vous avons chéris également, et si vous nous avez chéris de même, je crois fermement que ceux qui ont tant chéri ne changeront point de cœur.  Je te chérirai et tu me chériras toujours, et il ne sera jamais aisé de deviner lequel de deux chérira le plus l’autre.  Nous ne chérirons cependant nos enfants, ni moi ni votre maman, que dans le cas où vous chérirez vos devoirs.  Mais je ne veux point avoir de soucis sur ce point, et je me tiens pour sûr que votre papa et voire maman vous chériront toujours. 

Marque-moi, ma chère enfant, si tu es contente de cette conjugaison, et si tous les temps y sont (pour l’indicatif).  Adieu, mon cœur,

Joseph De Maistre.

On peut y voir un simple texte monotone ou, au contraire, une magnifique leçon de vie!

Que j’aime ce genre de texte…   Je suis toujours étonnée de voir à quel point les auteurs ont su utiliser la langue avec autant d’imagination!

C’est d’ailleurs ce que j’essaie de transmettre à mes enfants lorsque je leur propose ce genre de chose.  J’aime leur rappeler qu’un simple extrait, ou comme ici, une simple lettre d’un père à sa fille, rend témoignage de son amour pour elle.  Ce n’est donc pas un simple texte anodin que nous présente cet auteur, c’est un témoignage vibrant d’un père, fier de sa fille, heureux de recevoir sa lettre, etc.

Que peut-on souhaiter de plus!

Conclusion?  Ce petit livre rejoint les autres que je possède pour construire ma nouvelle année.  Ne vous en faites pas, heureusement ou malheureusement pour certaines, je vais vous faire découvrir plusieurs textes pendant l’année scolaire!

Bon dimanche!

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