Voici la légende que mon fils doit lire ce matin…
Il était plus qu’une légende car les » anciens » se souviennent encore de ses exploits. Il mourut le 12 juin 1924 à l’âge de 63 ans, frappé par une locomotive qu’il tentait de devancer. Figure marquante de la région de Charlevoix et du Lac-Saint-Jean au Québec, le Musée d’histoire du Lac-Saint-Jean lui rend hommage et expose plusieurs objets lui ayant appartenu.
Au cours de sa vie, on lui donna toutes sortes de sobriquets : Alexis le Nigaud, le Cheval du Nord, le Surcheval, mais c’est sous le nom d’Alexis le Trotteur qu’il est le plus connu.
Ses prouesses à la course ont fait le tour du pays. Il pouvait voyager aussi vite à pied que ses contemporains à cheval ou en voiture. Il gagnait même des courses contre les trains.
L’anecdote la plus connue veut qu’un jour, il se trouvait au quai de La Malbaie avec son père qui attendait le départ du bateau pour Bagotville. Le bateau quittait le quai à 11h00 pour arriver à Bagotville à 23h00. Alexis voulait embarquer avec son père, mais celui-ci refusa de l’emmener. Alors Alexis lui dit : » Quand vous arriverez à Bagotville, je prendrai les amarres du bateau. »
Et il fila. Pour faire le trajet par le chemin de terre, il fallait compter 146 kilomètres. Alexis retourna à la maison, saisit un petit fouet, se fouetta les jambes et partit.
Lorsque le bateau arriva à Bagotville, Alexis était sur le quai attendant son père. Il avait couru la distance en moins de 12 heures. On se demande encore d’où lui venait cette incroyable facilité à courir.
Mais qui était-il cet homme qui courrait plus vite que le vent ? Alexis Lapointe vient d’une famille de 14 enfants, il est né le 4 juin 1860 à Saint-Étienne-de-Malbaie dans la région de la Charlevoix au Québec. Son père exploitait une petite ferme et comme les travaux exigeaient beaucoup de bras, Alexis faisait mille travaux pour l’aider. Dès son jeune âge, il développa un goût pour les chevaux et les courses. Il se fabriquait des petits chevaux avec des bouts de bois et s’inventait des courses contre le vent.
Il aimait se mesurer à d’autres gamins. Avant de courir, il se fouettait les jambes avec une branche et criait : » Hue! Hue ! « . Et il partait comme une flèche, sautant par-dessus les obstacles et il gagnait toujours.
En grandissant, il devint un fameux joueur de tours. Il jouait de l’harmonica avec adresse et ce qu’il aimait par-dessus tout, c’était les veillées et les fêtes pour pouvoir danser. Il quitta la maison familiale très jeune et exerça plusieurs métiers pour gagner sa vie, dont celui de constructeur de fours à pain.
À cette époque, toutes les maisons du Québec avaient un four à pain construit à l’extérieur. Alexis excellait dans ce travail. Ces fours à pain de forme bien ronde étaient fabriqués de branches d’arbres recourbées servant d’armature et une épaisse couche de glaise séchée lui donnait sa forme. Il fallait voir Alexis piétiner la glaise dans l’auge avant d’enduire son four. Il se fouettait les jambes et ses muscles entraient en action. Une vraie machine à pilonner !
L’automne, il partait dans les chantiers (camp de bûcheron) et revenait au printemps. Et là, il parcourait les veillées pour danser. Il était infatigable, capable de danser des gigues pendant 5 heures d’affilée.
Alexis parsema sa vie de prouesses sans en tirer trop de gloire allant même jusqu’à se faire prier parfois pour participer à une course. Il n’acceptait pas toujours les défis qu’on lui lançait, mais quand il courait, il gagnait. On venait de loin pour le voir. Il rendait aussi des services contre un peu d’argent. Par exemple, il allait chercher le courrier dans un dépôt postal sur une distance de 30 kilomètres et faisait ce trajet en moins d’une heure.
À qui voulait lui lancer un défi à la course, il répondait : » Tu peux pas courir plus vite que Poppé ! » Poppé, le cheval du nord, c’était lui. Car voyez-vous, Alexis était un excentrique profondément convaincu qu’il aurait dû être un étalon et qu’il était né sous forme humaine par erreur. Alors, que ce soit pour construire ses fours à pain, pour aller bûcher ou danser, jamais il ne marchait Alexis … il trottait ou courrait …